En plein développement sensori-moteur, nos bébés sont de véritables touche-à-tout, avides de découvrir leur environnement. Si bien que leur envie de bouger est difficile à brider ! Dans ces conditions, comment envisager d’aller au musée ? Par crainte de déranger les autres visiteurs, nous n’osons parfois pas nous y aventurer. Pourtant, les lieux d’art des plus grands s’ouvrent désormais aux plus petits et des musées spécialement conçus pour eux voient le jour un peu partout. Les visites et les ateliers qui y sont proposés sont une formidable occasion d’éveiller nos petits à la culture et de développer leur créativité. Alors, suivez le guide…

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Des musées entièrement dédiés

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Musée en herbe à Paris, Cité des enfants à la Villette, Quai des petits à Toulouse… Les tout-petits ne manquent pas de musées conçus exprès pour eux. Créé il y a 5 ans par Pauline Lamy (diplômée en histoire de l’art et en médiation culturelle dédiée au jeune public), le Musée de poche, à Paris, ouvre ainsi grand ses portes aux moins de trois ans. « Nous exposons essentiellement des illustrations originales de livres jeunesse, explique sa fondatrice. Nous les accrochons très bas pour qu’elles soient à la portée des tout-petits et nous n’hésitons pas à décrocher certains tableaux sous verre pour qu’ils puissent les toucher ! » Dès leurs premiers mois, les bébés sont invités à participer avec leurs parents à des ateliers d’initiation par le biais de contes. Les 2-3 ans peuvent aussi se pencher sur une œuvre et s’en inspirer pour faire une création artistique. Les jeunes enfants peuvent aussi faire une visite libre avec des manipulations et un livret-jeu (à partir de 3 ans). Bref, impossible de s’ennuyer !

Bienvenue au Musée de Poche !

 

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Les musées de « grands » s’adaptent

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Une visite pour les bébés, au Louvre-Lens

En France, de plus en plus de musées proposent, eux aussi, des ateliers pour bébés, comme le centre Pompidou et le musée du Quai Branly-Jacques Chirac à Paris, le muséum de Rouen, le musée Matisse et le musée Bonnard sur la Côte d’Azur… C’est aussi le cas du Louvre-Lens qui, depuis 2014, accueille les 9 mois-2 ans pour des visites. Au programme ? « Une immersion dans le musée, à l’image des bébés nageurs à la piscine, répond Loraine Vilain, médiatrice culturelle du Louvre-Lens. Les groupes sont réduits pour qu’un lien personnel se crée entre les tout-petits et le médiateur. Chacun est confortablement installé sur des tapis pour observer une œuvre de grande taille. Celle-ci est présentée de façon à solliciter les cinq sens, afin de rendre les enfants acteurs de leur visite, et sert de support pour une activité. » Cette démarche a demandé aux médiateurs du musée de s’adapter : initialement orientés vers l’histoire de l’art et les arts plastiques, ils ont travaillé avec des micro-crèches locales, pour se sensibiliser à l’approche des tout-petits. « Ces ateliers ont beaucoup de succès, se réjouit Loraine Vilain. Nous avons d’ailleurs créé un deuxième programme un peu similaire, destiné aux 2-3 ans. »

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Un public pas si facile…

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Un joli bricolage, au Musée de Poche

Intéresser des enfants si jeunes à l’art est un défi ! « Comme ils sont timides, remarque Pauline Lamy, il faut commencer par briser la glace et installer un climat chaleureux, en les appelant par leur prénom par exemple. » Les animateurs du Musée de poche mettent tout en œuvre pour capter leur attention et les amuser. « Il faut parler lentement et adapter son vocabulaire, sans pour autant “parler bébé”. Notre conteur chante et s’accompagne au banjo et à l’harmonica. Il utilise aussi des marionnettes pour tenir les bébés en haleine ! » Même combat au Louvre-Lens, où les médiateurs multiplient comptines, jeux et effets de voix. Mais pour que les bébés se prennent vraiment au jeu, une seule solution : les parents doivent participer activement. « Ils doivent chanter avec nous et mettre les mains dans la peinture, prévient Pauline Lamy. Cela offre de jolis moments de complicité ! »

 

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… mais très ouvert !

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Une fois leur attention captée, les bébés sont prêts à toutes les expérimentations sensorielles. « Ils sont sans a priori et adorent toucher, faire du bruit, créer et même parfois goûter, s’enthousiasme Pauline Lamy. C’est un public passionnant qui n’a pas froid aux yeux et qui ne fait pas semblant ! » Les tout-petits peuvent s’intéresser à des œuvres variées. Au Louvre-Lens par exemple, ils apprécient autant les œuvres contemporaines de François Morellet que les statues antiques. Une diversité qui peut étonner : « Au début, nous pensions qu’il ne fallait leur présenter que des œuvres très colorées, raconte d’ailleurs Loraine Vilain. Mais nous avons constaté qu’ils étaient parfois naturellement attirés par des œuvres plus sombres ou dont on aurait pu penser qu’elles pouvaient leur faire peur ! » Tout dépend de si elles font écho à la vie de l’enfant ou non, et de la façon dont celui-ci va pouvoir se les approprier…

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Une belle expérience, même sans le guide

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Il est tout à fait possible d’emmener bébé au musée en dehors des ateliers… Mais pour que l’expérience soit agréable, il faut se préparer ! N’hésitez pas à vous renseigner à l’avance sur les dispositifs mis en place pour l’accueil des familles (accès aux poussettes, tables à langer, etc.) et choisissez des heures de faible affluence, en matinée par exemple. Prévoyez une visite courte, tout en laissant à bébé le temps de regarder et de réagir. « L’envie de partager, même sans connaissance artistique, suffit aux parents pour guider leur tout-petit, rassure Loraine Vilain. Faire observer les couleurs et les formes, raconter une histoire, chanter une comptine : c’est à la portée de tous ! » Avec ou sans guide, les enfants tireront toujours des enseignements précieux de leur visite. « Ils s’initient à l’art mais font aussi beaucoup d’autres apprentissages : comprendre les règles à respecter, entrevoir la notion de patrimoine, fréquenter des personnes extérieures, explorer de nouveaux territoires... confirme Pauline Lamy. Et c’est surtout l’occasion de passer un bon moment en famille ! »

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Des « baby-visites » avec les 0-8 mois

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Un bébé zen au Musée d’art moderne de Paris

C’est ce que proposent depuis deux ans Isabelle Martinez et Marie-Josèphe Bérengier, chargées d’action culturelle du musée d’Art moderne de Paris ! Preuve que l’on n’est jamais trop jeune pour une visite… « Nous offrons aux parents des moments de relaxation (avec du wutao et du yoga) au sein du musée, avec leur tout-petit contre eux en porte-bébé, explique Isabelle Martinez. La visite continue par une déambulation en douceur dans l’exposition ou les collections. Nous incitons les parents à s’approcher des œuvres, à les observer et à communiquer avec leur enfant. Nous proposons ensuite un atelier où les bébés manipulent des sacs sensoriels et les parents construisent à côté un objet souvenir à emporter. L’ambiance est calme et zen, et cela se passe toujours bien : nous n’avons jamais eu de bébés en crise ou très agités ! »


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Dossier réalisé par : Elise Rengot.

Illustration : © Laurent Simon